II – Analyse d'oeuvres musicales :
B) Jazz : Herbie Hancock : Cantaloupe Island
Ecouter1. Présentation de l'œuvre
Standard du jazz, enregistré en 1964 pour l’album « Empyrean Iles » sorti sur le label Blue Note Records. Joué à l’origine avec Freddie Hubbard à la trompette, Ron Carter à la basse, Tony Williams à la batterie et Herbie Hancock lui-même au piano, il continuera de le jouer tout au long de sa carrière avec différents musiciens ; sera même reprise par d’autres groupes. Il est l’un des compositeurs et pianistes de jazz les plus importants et influents de son époque. Il mêle au jazz des éléments de soul, de rock, de funk, de disco et de hip-hop.
Toute sa vie il essayera d’innover en matière de rythme et d’harmonie : il développe des rythmes extrêmement complexes autour de la mélodie et des accords ; parallèlement, ses improvisations avec d’autres musiciens sont parfois si sophistiquées et originales qu’il devient difficile de repérer les changements d’accords. Contrairement au free jazz qui casse les barres de mesure enlevant les accords et les harmonies, Herbie Hancock enlève les accords, mais garde le tempo comme base.
Ici la rythmique est très en place, le piano très relax et la tension entre les deux crée le swing.
À la base, le trompettiste joue le thème, le pianiste dont la main gauche est reprise par la contrebasse assure l’accompagnement, la batterie donne le rythme et dynamise le tout. Pour ce qui est du thème, le piano et la contrebasse assurent toujours le même motif composé de trois accords.
Le reste du morceau et surtout la partie improvisation deviennent par la suite une dérivation des modes, le morceau étant l’un des plus représentatifs du jazz modal. Les versions lives surtout ne montrent que peu de contraintes hormis le rythme imposé par la batterie. Cependant malgré cette apparente liberté, l’enchaînement des accords et le passage d’un mode à l’autre se font sur certaines règles qui ne relèvent pas de l’improvisation. En effet malgré le niveau impressionnant des musiciens, un quartette tient son équilibre au bon respect des modes.
Rythmiquement le morceau est simple d’apparence avec un rythme binaire en 4/4. Cependant, les éléments joués par la batterie témoignent des recherches complexes et des innovations musicales d’Herbie Hancock à cette époque. Le rythme de base du piano se retrouve dans les deux mains qui alternent temps forts et contretemps pour donner un swing au rythme.
Le schéma en dessous montre les temps joués par la main droite et la main gauche :
Ainsi on peut le voir presque tous les temps sont joués soit par la main droite ou la main gauche. Seul un demi-temps n’est pas joué volontairement pour insérer un élément de swing.
2. Analyse musicale
Ce qui fut difficile ici était de trouver une trace écrite des multiples improvisations, ce que nous ne pourrons donc pas analyser. Pour combler ce trou, nous allons analyser le thème principal de l'oeuvre, en harmonie avec les accords.
Nous pouvons déjà voir la présence d'une rythmique de base avec comme accord de base la Fa mineur 7 : Fa, La b, Do, Mi b.
A la main gauche, on peut voir que 3 des 4 notes de l'accord sont jouées :
Fa | Do | Mi b | Fa |
1,5 temps | 1,5 temps | 0,5 temps | 0,5 temps |
Fondamentale | Quinte | Tierce (mineure) | Fondamentale |
À la main droite, 5 accords se suivent : 3 accords de Fa et 2 de Si, la quinte diminuée du Fa (3 tons au dessus) :
Fa min | Si b min | Fa 7 (sans tierce) | Si b Maj | Fa min |
0,5 temps | 1 temps | 1 temps | 0,5 temps | 0,5 temps |
À la fin de la quatrième mesure, on voit le thème apparaître avec deux fois la note FA jouée, qui semblent donc être la note dominante du morceau.
Le saxophone débute le thème, une sorte de mélodie qui sera répétée tout le long du morceau. 8 notes se suivent : La♭- Si♭- La♭- Si♭- Do – Mi♭- Fa. Nous pouvons voir alors que ce sont les quatre notes de l'accord de bas : Fa mineur 7, avec en plus un Si♭, la quinte diminuée du Fa.
Le piano passe ensuite à d'autres accords :
Le Ré bémol 7 prend la place du Fa : Ré b, Fa, La b, Si. Nous pouvons cependant voir que cet accord et le précédent ont deux notes en commun : le Fa et le La b. Nous pouvons aussi remarquer que la main gauche joue encore une fois les notes de l'accord : Ré b, La b, Si, Ré b. La main gauche sert donc de support, de base.
Nous pouvons voir que le thème ne change pas, mais si nous écoutons ce changement d'accord, on pourrait cependant le croire : cela vient du fait que ce que joue le saxophone n'a plus les mêmes rapports avec le piano, ce qui crée une sorte de rupture sans vraiment en être une.
Finalement, nous pouvons aussi remarquer que le Fa, se retrouvant dans les deux accords, sert de transition :
Nous avons vu ici qu'il y avait un piano qui jouait à la main droite certains accords, tous en rapport avec un accord de base, lequel est « émietté » à la main gauche, servant de base au morceau. On a ensuite un soliste, ici le saxophone, qui vient jouer une mélodie, un thème, basé strictement sur les notes de l'accord fondamental.
BINET Armand - DIA Miléna - GOTCHAC Nicolas - SOUTY Tom
TPE de Tale S - Lycée La Source - 2009/2010